« Je suis pour ouvrir le débat [sur la sécurité européenne] qui doit donc inclure la défense antimissile, les tirs d’armes de longue portée, l’arme nucléaire pour ceux qui l’ont ou qui disposent sur leur sol de l’arme nucléaire américaine. Mettons tout sur la table et regardons ce qui nous protège véritablement de manière crédible », affirmait samedi Emmanuel Macron dans une interview accordée au groupe de presse Ebra. Ce n’est pas la première fois qu’Emmanuel Macron entretient l’ambiguïté sur une défense nucléaire à l’échelle de l’Union européenne puisqu’en 2020, le président de la République avait déjà évoqué la contribution de la dissuasion nucléaire française à la sécurité en Europe. En faisant de la dissuasion un « élément incontournable de la défense du continent européen », Emmanuel Macron tente, en parallèle, de relancer les débats sur la défense de l’Union européenne à quelques semaines des élections européennes.
Dans ce contexte de campagne électorale, la tête de liste LR pour les européennes, François-Xavier Bellamy, dénonce une « expression d’une gravité exceptionnelle, parce que là nous touchons au nerf même de la souveraineté française ». Selon la tête de liste, cette proposition représente une étape périlleuse vers une forme de fédéralisme rappelant son rejet pour une « Europe qui signifie la dépossession plus en plus grande de nos États de leurs fonctions essentielles ». Bruno Retailleau, chef de file des sénateurs LR, considère que la proposition du chef de l’Etat est « inacceptable ».
Marine Le Pen a, pour sa part, affirmé sur X que le « programme [d’Emmanuel Macron] est de déposséder le peuple français de tout ce qu’il a construit, de tout ce qui le protège ». Une critique qui ne se cantonne pas aux bancs de la droite et de l’extrême droite puisque le coordinateur de La France Insoumise, Manuel Bompard, qualifiait ce matin sur Public Sénat d’ « hérésie » la proposition du chef de l’Etat.
Alors que la question de la dissuasion nucléaire avait occupé une place majeure lors des débats au Sénat sur la Loi de programmation militaire au printemps dernier, les élus du palais du Luxembourg ont du mal à dissimuler leur scepticisme par rapport aux propositions d’Emmanuel Macron, notamment sur la forme. « Une nouvelle fois, le Président Macron improvise, au détriment de notre crédibilité. En démocratie, on peut débattre de tout, mais pas de cette façon. Ce sujet aurait d’ailleurs pu être évoqué lors de l’examen de la loi de programmation militaire », tranche Cédric Perrin (LR), président de la commission des affaires étrangères. « Emmanuel Macron parle trop du sujet nucléaire militaire sans le traiter sérieusement, il n’y a pourtant rien de plus souverain et sérieux comme sujet », déplore Mickaël Vallet, sénateur socialiste et membre de la commission des affaires étrangères.
Une approche qui agace, autant à gauche qu’à droite. « La défense européenne « crédible » que le chef de l’État ne cesse d’appeler de ses vœux ne verra jamais le jour s’il persiste à lancer des ballons d’essai dans la presse, au lieu d’en discuter dans un cadre sérieux avec nos alliés », juge Cédric Perrin.
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