Les réunions s'enchaînent mais les discussions avancent peu. Ce mercredi 13 décembre, la Première ministre Élisabeth Borne a reçu les ténors de la droite Éric Ciotti, Bruno Retailleau, Olivier Marleix ou encore Annie Genevard pour obtenir des concessions sur le projet de loi immigration, en vue de la commission mixte paritaire (CMP) qui jouera le destin du texte. La cheffe du gouvernement a demandé aux Républicains, mais aussi aux centristes un peu plus tard, de retirer trois points précis, ajoutés au texte originel par le Sénat. Réunis ce mercredi soir, le groupe Renaissance a voté à quasi-unanimité pour le mandat donné aux négociations avec ces conditions.
La première: la suppression de l'Aide médicale d'État (AME). Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire a d'ailleurs appelé son ancienne famille politique à la "mansuétude" et a dit espérer que "les LR comprennent qu'il faut bouger les lignes sur deux points sensibles pour notre majorité: l'AME et les conditions d'accès aux aides sociales" pour les étrangers. Ce conditionnement de l'accès aux allocations non-contributives pour les étrangers fait partie des concessions demandées à la droite par le gouvernement, tout comme le durcissement du Code de nationalité via, notamment, la suppression de l'automaticité du droit du sol.
Concernant l'AME, la droite pourrait y renoncer dans le texte sur l'immigration, la Première ministre s'engageant à lui dédier un texte plus tard. Mais, à ce stade, il est hors de question de retirer ces trois points, y compris pour les centristes. Sortant de Matignon, le président du groupe Union centriste au Sénat, Hervé Marseille a émis l'hypothèse d'un accord "sur une partie du texte" seulement, citant bien comme thèmes pouvant être sortis du projet de loi "l'aide médicale d'État, le code de la nationalité, les prestations sociales pour les étrangers" qui "pourraient donner lieu à des textes (...) parallèles".
Le Première ministre leur a rappelé que, même avec la suppression de ces trois points, elle n'était pas sûre que cela passe auprès de sa majorité. Au cours de son vote dans la soirée, le groupe Renaissance a aussi demandé à ce que l'interdiction des mineurs dans les centres de rétention administrative, adoptée en commission à l'Assemblée, fasse partie des compromis de la droite. Le projet de loi déposé par le gouvernement limitait initialement l'interdiction à 16 ans.
Un nouveau rendez-vous à Matignon est prévu jeudi matin avec LR, pour voir si leur position a évolué. Au sein de la majorité présidentielle, un clivage s'installe entre l'aile gauche qui commence à se braquer avec des frondeurs et ceux qui estiment qu'il vaut mieux un mauvais texte que pas de texte du tout, étant donné que la droite a la main. Certains plaidant même pour aller jusqu'à reprendre le texte du sénat, si LR reste inflexible jusqu'au dernier moment, en se disant que le Conseil constitutionnel fera le tri lui-même. En cas d'absence d'accord avec LR, un "plan B" existe tout de même. Celui d'un texte a minima comprenant juste les nouvelles mesures d'éloignement pour les personnes en situation irrégulière. Mais, dans ce cas également, il n'est pas certain que cela convienne à toute la majorité.
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