Le projet de loi « immigration » a-t-il été adopté sans le soutien de l’extrême droite ? L’élément de langage du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a été repris, mercredi 20 décembre, sur France Inter par Elisabeth Borne. La première ministre s’est félicitée, à son tour, que le projet de loi ait « été voté sans les voix du Rassemblement national [RN] », conformément à « un principe que [le camp présidentiel s’était] donné ».
La Macronie justifie ses calculs par un exercice de politique-fiction. La première ministre soutient que si les députés RN s’étaient abstenus, alors celui-ci aurait été adopté « avec 261 voix pour et 186 contre », puisque dans ce cas la majorité absolue aurait été de 224 voix. Mme Borne assure même que si les députés RN s’étaient opposés au projet de loi, le texte serait tout de même passé : « Si le RN avait voté contre, je pense qu’on aurait eu des voix, on aurait eu des voix en plus. »
Rien ne permet d’appuyer ces suppositions. A l’inverse, si l’on ajoute les 88 voix des députés RN aux 186 votes contre, dans l’hypothèse où le RN aurait décidé de ne pas soutenir un texte qui reprend nombre de ses chevaux de bataille, le projet de loi n’aurait pas atteint le seuil nécessaire pour son adoption. Par ailleurs, le RN et Les Républicains (LR) sont les deux seuls groupes à avoir totalement approuvé le texte (88 députés favorables sur 88 députés inscrits), quand le groupe Renaissance a enregistré 20 votes contre et 17 abstentions. Le RN représente enfin, derrière le groupe Renaissance (131 voix pour), le deuxième plus gros contingent de députés favorables au texte. Cela n’est pas suffisant pour affirmer que le projet de loi « immigration » a été adopté « grâce » au RN, mais assez pour acter qu’il n’a pas, à l’évidence, été adopté « sans » lui.
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